Créée en 2007 par la fusion entre La Direction générale des Impôts (DGI) et la Direction générale de la Comptabilité publique (DGCP), plus connue sous le vocable « Trésor public », la DGFiP emploie un peu plus de la moitié de ses personnels à la gestion fiscale (calcul de l’assiette, contrôle fiscal, missions foncières et cadastrales, contentieux…). Le reste du personnel est réparti entre les missions de gestion publique (gestion des comptes de l’État, des collectivités territoriales et de leurs opérateurs, gestion des retraites de l’État, politique immobilière de l’État, évaluation du Domaine, vente aux enchères des biens en déshérence ou saisi, recouvrement…) et les fonctions supports. De cet ensemble, seulement 10 % d’agents sont préposés à la mission de contrôle fiscal, soit à peu près 10.000 personnes.

Trop de fonctionnaires ?

Le personnel ayant la charge d’une mission de service public est recruté selon deux modalités : le concours pour les fonctionnaires et le contrat pour les autres. Si on y rajoute le nombre d’emplois subventionné à travers l’économie sociale (les associations entre autres), on obtient le nombre d’emplois non-marchands (ENM). À la différence du nombre de fonctionnaires, c’est ce critère d’ENM qui définit la charge salariale qui pèse sur le secteur marchand, c’est-à-dire qui est rémunéré par l’impôt.
Et surprise, si la France a bien plus de fonctionnaires que l’Allemagne, le Royaume-Uni et les États-Unis, elle ne compte que 125 ENM/1.000 hab. contre 126 ENM/1.000 hab. en l’Allemagne et au Royaume-Uni et 131 ENM/1.000 hab. aux les États-Unis[. Ainsi, la France fait moins peser sur le secteur marchand que ses principaux concurrents, ses emplois du secteur non-marchand. Cette réalité se voit renforcé par le fait qu’un fonctionnaire coûte moins cher, retraite comprise, que son équivalent contractuel. Le débat sur le coût et la suppression des fonctionnaires est ainsi au niveau de celui relatif aux migrants, beaucoup d’affabulations, une pincée de haine primaire et pas mal d’idéologie.Cette question du coût et du nombre de fonctionnaire évacuée n’interdit pas dans un futur proche d’imaginer un DGFiP encore plus efficiente dans le nouveau paradigme fiscal de l’IPP, qui rendrait des emplois pour gonfler les rangs des personnels médicaux, d’éducation et de sécurité qui viennent cruellement à manquer. Elle n’empêche pas aussi de repenser son approche et ses missions face à l’impôt.

Le Conseiller financier public (CFP)

Remarquons d’abord que tout comme pour l’impôt sur le revenu (IR), la moitié des foyers fiscaux en France possédant moins de 50.000 EUR d’actif net (base du calcul de l’IPP faite à partir du patrimoine auquel nous soustrayons les dettes et autres charges) ne seront pas assujettis à l’IPP ou seulement de manière symbolique par un prélèvement forfaitaire. Cette population n’aura alors que peu besoin d’accompagnement.

Tournons-nous maintenant vers les populations de contribuables faisant exceptions. Un nombre appréciable de retraités modestes avec un actif net élevé se demanderont s’ils doivent se séparer de leur résidence et seront-ils de facto mis à la rue ? À ce propos, combien vaut vraiment leur bien immobilier ? C’est à ce niveau que le conseiller financier public, nouvelle fonction au sein de la DGFiP, ferait son apparition pour évaluer les biens, expliquer le cadre administratif et conseiller a priori l’usager. Il vérifierait qu’ils ont bien tenu compte de toutes les déductions possibles, notamment la franchise supplémentaire à laquelle ils ont droit parce qu’ils ont payé l’IRPP-CSG-CRDS toute leur vie et les conseillerait sur les options disponibles : investissement dans la transition écologique à travers des bonds de la Banque publique d’investissement (BPI) au mandat rénové pour augmenter leurs charges, session de biens immobiliers aux descendants avec conservation de l’usufruit, engagement d’une médiation avec un notaire…

Autre population clé, les usagers très fortunés appuyés d’experts comptables, avocats d’affaires et autres gérants de fortune qui voudront optimiser au maximum leur IPP. Ces derniers pourraient comme avec le vérificateur dans le passé a posteriori représenter leurs clients a priori face au CFP, qui pourra alors les orienter vers des solutions plus adaptés à leurs besoins comme la sortie de la bourse d’une entreprise par offre publique de retrait obligatoire (OPRO), l’avantage fiscal dans le cadre de l’IPP en cas d’engagement à ne pas vendre mais à transmettre son entreprise…

Troisièmement, quid des fortunés de l’évasion fiscale ? Pour les meilleures volontés, l’IPP serait l’occasion d’une amnistie généralisée d’un délai d’une année mais sans franchise de l’IRPP-CSG-CRDS payées menée par le CFP. Pendant cette période, les éventuels récalcitrants se verraient informés à travers des campagnes d’information publiques mais aussi ciblées auprès des banques, des notaires et des experts-comptables, des nouveaux risques encourus : prescription plus longue, fin du verrou de Bercy et donc pénalisation de tous les dossiers, peines équivalentes pour le fraudeur et le complice… rendant clair que le meilleur conseil à donner est de se conformer au droit fiscal. Si certains voulaient après cela toujours tenter l’aventure de l’évasion, c’est le vérificateur fiscal nouvellement formé à l’anglais et aux pratiques comptables généralement acceptées (Generally Accepted Accounting Practice – GAAP) et spécialisé dans le plan-comptable de pays étrangers qui reprendrait tous ses droits.Enfin, intéressons-nous à la grande majorité des usagers assujettis qui serait peu ou prou la même que celle de l’IR. Ceux-ci voudront certainement comprendre, être accompagnés et conseillés sur l’IPP. Le CFP aura alors tout son rôle à remplir a priori pour faire l’évaluation des biens, accompagner le remplissage de la déclaration, réorienter l’épargne thésaurisée vers les investissements à très long terme garantis par la BPI et autres nouveaux avantages de défiscalisation…

Un impôt adaptatif

Les taux progressifs de l’IPP de 0 à 3 % de l’actif net ne seraient pas fixes et varieraient certainement chaque année par le vote du Parlement pour s’adapter à la réalité économique changeante des usagers. À titre d’exemple, si le taux de 1,25 % venait à augmenter à 1,26 %, cele provoquerait 1 Mrd EUR de recettes supplémentaires. Mais ce serait certainement le contraire qui se déroulerait au fur et à mesure des corrections d’évaluations du patrimoine des Français aujourd’hui mal évalué, les taux devraient être votés à la baisse sachant que ce même patrimoine a progressé deux fois plus vite que le produit intérieur brut depuis quatre décennies. Aussi, l’IPP ne se mettrait pas en place sur une année mais par étape sur dix ans, afin d’éviter un choc économique aux effets difficilement mesurables, ce qui entraînerait cependant un besoin accru du CFP tout au long de cette période de transition.

Ainsi, la DGFiP ferait elle aussi sa révolution paradigmatique passant d’une logique de contrôle a posteriori à un accompagnement a priori. Le CFP pratiquerait une sorte de « médecine préventive financière » aidant l’usager à chaque étape de sa démarche de contributeur à l’effort national. Il effectuerait ou vérifierait l’évaluation des biens et des charges, la traduirait en actif net taxable, mesurerait la perte patrimoniale qui incombe à la thésaurisation, calculerait pour l’usager un optimum partagé entre donations aux descendants, placements en obligations pour la transition écologique selon ses priorités, investissements privés financés par le prêt.

Plus loin, ce conseiller financier public pourrait se voir attribuer le droit d’effectuer une compensation entre l’impôt payable et un éventuel Revenu Universel d’Existence (RUE) afin de ne pas multiplier les opérations, les délais et les personnels. Il deviendrait ainsi un partenaire de l’usager dans une relation de confiance. L’IPP ne changerait plus alors seulement la façon dont l’État intervient dans l’économie en favorisant ou non son essor, mais il transformerait directement la relation que chaque citoyen entretient avec lui en redéfinissant sa perception de son rôle contributif.